jeudi 17 janvier 2013

LA SAQ SOUS HAUTE SURVEILLANCE: ANALYSE DE LA DÉCLARATION PUBLIQUE


Note:  Ce billet a aussi été publié sur le Huffington Post Québec le 17 janvier 2013   (voir ici).

Vous ne serez pas surpris si je vous dis que mon dernier billet publié mercredi dernier à la une du Huffington Post Québec qui sonnait l’alarme à propos de la disparition rapide des vins vendus au Québec à moins de 10,00$ a fait boule de neige.

Le lien de cet article a été partagé par plus de 500 personnes faisant en sorte que des dizaines de milliers d’autres ont pu en prendre connaissance.  Le flambeau a par la suite été repris par plusieurs autres médias de la province (stations de radios et de télévisions) auxquelles j’ai accordé plusieurs entrevues le jeudi et vendredi suivant. On estime que plus de 750,000 personnes ont lu ont entendu parler de ce billet suite à cette couverture médiatique.

Parmi les médias écrits, le Journal Les Affaires publia le 11 janvier dernier sur leur site internet un article basé sur des chiffres et des faits en provenance du très crédible site vinquebec.com qui existe depuis 15 ans  et qui est alimenté par l’ex-journaliste de Radio-Canada à Ottawa, Marc-André Gagnon. On confirme de manière non équivoque dans cet article, l’exactitude des chiffres à quelques unités près dont j’ai fait mention dans mon billet précédent concernant le nombre de vins de moins de 10,00$ qu’il y avait à la SAQ en 2009 (183), et celui qui prévalait en décembre dernier (63).

On peut aussi y constater que le nombre de vins vendus entre 10,00$ et 15,00$ ont eux aussi commencé à décliner, surtout en 2012 (-10%). En contrepartie, les vins vendus entre 15,00$ et 20,00$ sont en pleine ascension (+31%). Chose importante à retenir, le billet du 7 janvier dernier de vinquebec.com donne des exemples très précis de vins éliminés par la SAQ et qui ont été remplacés par d’autres plus chers, ceci étant même une nouvelle politique officielle que celle-ci appliquerait systématiquement depuis déjà deux ans.  

Pour sa part, le billet du 15 janvier, est encore plus révélateur, puisqu'il indique le nombre de vins par tranche de un dollar et démontre clairement que le nombre de vins offerts par la SAQ augmente avec le prix!  Je désire remercier M. Gagnon pour son excellent travail de recherches. Si ces chiffres ne réussissent pas à vous convaincre de l’existence d’une stratégie planifiée pour augmenter le prix moyen des vins vendus à la SAQ, vous ne le serez alors jamais. Mes affirmations passées ne reposaient certes pas sur de la fabulation.

Ceci  a suscité un grand intérêt parmi la population, et celle-ci s’est exprimée en grand nombre sur cette question, soit par l’entremise de lignes ouvertes ou par la page Facebook des médias qui ont couvert le sujet. Bien que non scientifique, on peut en conclure qu’une immense majorité de personnes se sont indignées de la disparition possible de tous les vins vendus moins de 10,00$ et se sont demandées comment diable notre monopole d’état avait bien pu arriver à la conclusion il y a trois ans que ses clients n’en voulaient plus.

À cause de la propagation rapide de cette nouvelle ainsi que de la réaction de la clientèle, la SAQ a cru bon et avec raison de faire une déclaration publique.

En résumé, celle-ci a reconnu qu’effectivement le nombre de ses  vins à prix d’entrée de gamme avait très fortement diminué mais que son intention n’était pas de faire complètement disparaître les vins de moins de 10,00$. Ceci, selon elle, s’était produit par le simple fait des hausses de taxes de toutes et l’inflation qui avaient fait en sorte de propulser ces produits au-dessus de la barre des 10,00$.* Dans un même souffle,  elle annonça en grande pompe qu’elle avait d’ailleurs déjà décidé auparavant d’ajouter au cours de cette année, 5 à 10 vins, dont le prix ne dépasserait pas les 10,95$, après avoir constaté l’existence d’une demande de la part de ses clients pour cette gamme de produits.

*Tel que détaillé plus haut par le Journal Les Affaires, rien n’a été dit sur la principale cause de ces disparations de ces vins, soit le remplacement planifié de ces produits abordables par d’autres plus chers pour les consommateurs mais plus payants pour la SAQ.
 


Je sais que certains d’entre vous décèleront dans cette déclaration de notre monopole d’état quelques contradictions avec sa ligne de conduite des trois dernières années, et auront même des doutes quant à sa motivation réelle, mais le fait demeure que la Société des Alcools s’est publiquement commise face à la réalisation de cet engagement, modeste j’en conviens, mais engagement tout de même.

Est-ce que je suis content, me demanderez-vous. Oui, puisque l’hémorragie des produits concernées est supposément arrêtée, du moins pour le moment. Est-ce que je suis satisfait me demanderez-vous? Et bien, si on analyse les détails de leur déclaration publique de la semaine dernière, la réponse est non. Voici pourquoi.

Premièrement, vous avez sans doute vous-même remarqué que dans cette déclaration, la SAQ a promis d’ajouter de nouveaux produits au cours de cette année, MAIS que la barre minimum du prix de ceux-ci avait été haussée à 10,95$, alors que tout le débat soulevé par mon billet de la semaine dernière portait sur la catégorie des vins vendus à moins de 10,00$.  Cette habile stratégie de leur part de hausser la barre de prix de 10% (de 9,95$ à 10,95$) pour les vins d’entrée de gamme aura pour effet de nous en  donner beaucoup moins que ce dont elle semble consentir à première vue. Il est assez curieux que la manière que la SAQ a retenue pour préserver le nombre de vins vendus moins de 10,00$ comme elle prétend vouloir le faire sera d’ajouter dès cette année quelques nouveaux produits dont le prix pourra aller jusqu’à 10,95$!  Cherchez l’erreur.

Deuxièmement, après avoir fait disparaître plus de 100 produits de moins de 10,00$ en trois ans, voilà qu’on vous en donne 10, peut même seulement 5, et pour un prix pouvant aller n’oublions pas jusqu’à 10,95$.  À ce rythme, cela prendra 10 ans pour retrouver le nombre de vins abordables de 2009 si on ajoute 10 produits par année, et 20 ans si on en ajoute 5. Cela est l‘équivalent d’appliquer un pansement à quelqu’un qui a la veine jugulaire tranchée; le sang arrêtera peut être un peu de couler mais ce n’est pas cela qui sauvera le patient.
 
Mais revenons à la mini promesse de la SAQ (5 à 10 nouveaux produits à bas prix pour cette année). Il faudrait au moins s’assurer que cette promesse se concrétise. Il serait dommage de se retrouver l’an prochain avec la même situation qui prévaut aujourd’hui, ou dans une situation encore pire.

Étant de nature optimiste, j’ai toujours tendance, jusqu’à preuve du contraire, à faire confiance aux autres. Je mets toutefois toujours en pratique le bon vieux dicton anglais « Trust but check », que l’on pourrait traduire ainsi « Faites confiance mais vérifiez!». 

J’ai donc dressé cette semaine deux listes. Une première, où apparaissent le nom, le code et le prix de tous les vins présentement vendus moins de 10,00$, et une seconde, avec les informations des vins présentement vendus entre 10,00$ et 10,95$. Je serai à même ainsi de comparer le 31 décembre de cette année, les différences pour chacune de ces deux catégories. Espérons que l’on ne se contentera pas d’éliminer en grand nombre les vins de la catégorie des vins vendus en bas de 10,00$ et d’augmenter celle des vins vendus entre 10,00$ et 10,95$ pour affirmer que la promesse a été respectée. Ne jouons pas sur les mots et encore moins avec les chiffres. En quelque part, il faut que les bottines suivent les babines.

Mais je vous l’ai dit, je crois à la bonne foi de la SAQ. Je l’invite donc à m’informer au fur et à mesure qu’arriveront cette année les fameux 5 à 10 nouveaux produits. Me contacter est facile car mes coordonnées se retrouvent au bas de chacun de mes billets et sur mon blogue. Puisqu’il avait été mentionné dans le récent communiqué de la SAQ que la décision d’ajouter de nouveaux produits dans cette gamme de prix après déjà été prise depuis un certain temps, on peut prévoir que les premiers nouveaux produits ne devraient pas prendre 6 mois pour commencer à arriver sur les tablettes.

Lorsque disponibles sur le marché, je me procurerai une bouteille de chacun de ces nouveaux produits et je publierai ici même dans cette chronique hebdomadaire, toutes les informations à leur sujet, ainsi que mes notes de dégustation que je m’engage à être impartiales et conformes à la réalité. Nous pourrons ainsi, chers lecteurs et lectrices, ensemble évaluer si la SAQ nous a trouvé des vins avec de bons rapports qualité/prix. Il serait en effet trop  facile d’ajouter de petits vins maigres et dilués qui n’auront pas de succès, pour affirmer par la suite, que les vins de cette catégorie de prix se vendent mal.

Un mot pour dire que je ne revendique nullement ici  l’exclusivité de la défense des droits de la veuve et de l’orphelin! J’invite donc ceux et celles que cela intéresse, soit tous les autres chroniqueurs, blogueurs, journalistes, de même que la population en général, à garder l’œil ouvert et demeurer vigilants  en vous questionnant sur les décisions administratives de la SAQ qui est habituée de faire cavalier seul. N'oubliez pas: faites confiance mais vérifiez!

J’espère sincèrement que la Société des Alcools du Québec profitera de l’opportunité qui lui est ainsi offerte pour démontrer qu’elle a un réel souci de bien répondre aux besoins de toute sa clientèle. Surprenez-nous! Épatez-nous! On vous en sait capable. Parmi vos nouveaux produits, trouvez en qui seront en bas de 10,00$ et pourquoi pas un ou deux autour de 8,00$-9,00$? Ajoutez-en 10 ou même 12 au lieu du minimum de 5 promis et épatez-nous davantage. On ne demande pas mieux!

Suggestions de la semaine

Deux (presque) grands vins rouges à prix plus que raisonnables:

Château Peyros, Vieilles Vignes, Madiran, 2008, France

Cépages:  80% Tannat et 20% Cabernet Franc 
Code #:    488742 
Prix:          18,15$
Servir:       17° Celsius
Carafer:    30-40 minutes

Voici le millésime 2008 qui vient d'arriver du Château Peyros, un vin dont je vous avais vanté les mérites l'automne dernier avec le millésime 2007.  Ce nouveau millésime est tout aussi bon et représente le même excellent rapport qualité/prix.  Un achat à ne pas manquer et qui s'envolera rapidement. Pour plus de détails, voir ici.



1938, Puisseguin, Lussac St-Émilion, 2005, France

Cépages:  90% Merlot, 5 % Cabernet Sauvignon et  5% Cabernet Franc
Code #:    11655601 
Prix:          25,75$
Servir:       17° Celsius 
Carafer:    15-20 minutes

La cuvée 1938 (l'année de création de la cave) est une marque des Vignerons de Puisseguin Lussac St-Émilion qui est composée de vieilles vignes des meilleures parcelles de cette coopérative. Cultivés, cueillis et vinifiés avec soin, les raisins produisent  ainsi un vin qui est ensuite élevé 18 mois dans des barriques neuves de chêne. Maintenant âgé de 7 ans, ce vin souple, arrondi, suave et long, caresse littéralement le palais. Prêt à boire et peut se garder encore 3-4 ans. Pour les viandes rôties ou grillées ou les ris de veau poêlés, idéalement avec des champignons.

Aucun commentaire:

Publier un commentaire